Nom : Esperanza Prénom(s) : Selma Age apparent : 19 ans Age réel : 17 ans Statut civil : Irréel Métier : violoniste Sexualité et statut: inconnu / célibataire Lieu d'habitation : le Centre Lieu d'études : le Quartier Nord

Description physique : Selma semble souvent indifférente à ce qui l’entoure ; ses traits sont lisses et figés. Mais lorsque son archer glisse sur les cordes, son visage s’anime et dans un ballet d’expressions, il transmet tout à coup toutes les émotions qu’il est humainement possible d’exprimer. C’est comme d’observer deux personnes différentes : l’une est impassible et effacée, l’autre est fougueuse et passionnée. Ce double visage est encadré d’une chevelure d’un roux foncé presque rouge. Une teinte qui peut encore passer pour naturelle tant que le soleil ne tombe pas dessus aux heures les plus chaudes. Parce qu’alors, il la rend si flamboyante qu’il est impossible de se tromper sur l’origine artificielle de la jeune fille. Ses yeux, en revanche, sont d’un brun quelconque. Rien dans l’iris ne trahit son irréalité. Selma se félicite que Nyah ait eut tant d’admiration pour les yeux de sa mère, couleur qu’elle jalousait secrètement au dépend de son beau regard bleu ciel.

  Selma est une jeune fille discrète et peu démonstrative. Elle ne vous dira jamais qu’elle vous aime et à moins de la connaître parfaitement, vous ne le verrai pas dans ses gestes. Néanmoins, c’est une jeune fille loyale et aimante. Pour les plus patients d’entre vous, elle sera assurément une amie fidèle qui ne vous trahira jamais. Elle pourra même, parfois, se montrer plus souriante qu’à l’accoutumé, et cela parce que vous aurez su arracher sa confiance, libérée des entraves ordinaires.

Si Selma n’est pas plus ouverte socialement, c’est tout simplement parce qu’elle est rongée par un mal commun qu’elle ne sait pas combattre : la peur. Selma a peur de mourir. Elle sait que si sa créatrice vient à mourir, elle disparaîtra avec elle. Ce néant qui lui tend les bras la terrorise. Elle voudrait tant être humaine. En projetant son rêve, sa créatrice l’a également condamné à ressentir. Et ses émotions, Selma les porte comme une armure : presque inexistante à l’extérieur, aussi intangible que son existence ; si vivifiante à l’intérieur, aussi puissante que son amour de la musique. C’est peut-être ça, d’ailleurs, qui fait d’elle une si bonne violoniste. Depuis qu’elle a intégré le conservatoire, on la dit plus douée que la plupart des élèves.

  En quelques mots, Selma se protège en se barricadant derrière un caractère flegmatique, voire placide. Mais la vie qui l’habite est dévorante.


= Le recensement =
  Selma en a peur. Elle craint que son nom n’apparaisse sur une liste de persona non grata. Son droit à la vie, elle veut le gagner et le garder. Aussi, le contrôle anodin de ses papiers est-il toujours une épreuve. Heureusement pour la jeune fille, son flegme joue pour elle et bien souvent, on ne la retient pas plus que nécessaire. Pourtant, c’est une source de grande agitation intérieure.

Ces faux-papiers, c’est le père de Nyah qui les lui a fournis. Il est aussi celui qui lui a permis d’intégrer le conservatoire. Sa femme et lui chérissent tant leur fille qu’ils préservent sans compter tout ce qui émane d’elle. Et cela inclue avant tout Selma, vestige vivant des rêves de la jeune malade.

  L’argent achète bien des choses. Il a acheté une vie, un foyer, une identité et une scolarité à Selma. L’espoir des parents de Nyah lui ont donné un nom et une protection.

  La naissance des émotions est une chose étrange.

  Je suis née à 19 ans. Je suis naturellement douée pour la musique et mon violon est comme une prolongation de mon corps. À chaque instant qui passe, mon esprit est envahi d’accords qui rythment mes journées comme mes nuits. Nyah m’a faite ainsi. Elle qui a passé la moitié de sa vie alitée et qui rêvait d’être concertiste.
Elle est venue au monde dans une famille riche et tout lui souriait. Sa mère la couvrait de baisers, son père de cadeaux. Elle était leur bien le plus précieux et le but de leur vie. Malheureusement, leur bonheur fut mis à mal par une tumeur maligne qui rongeait ce trésor.

Nyah est malade. À tel point qu’à l’âge de 9 ans, lorsque s’est déclarée la maladie, elle a reçu l’ordre du médecin de se ménager le plus possible. Pour elle, cela signifiait plus d’école, plus de sorties, et une vie limitée à sa chambre d’enfant. Ses parents, dévastés mais désireux de ne pas se laisser emporter par le chagrin, payèrent les services d’un précepteur. Aussi Nyah suivit-elle un cursus normal d’enseignement général puis tertiaire avec une spécialisation dans la musique. Cependant, son état ne lui permettait pas vraiment d’étudier son instrument de prédilection : le violon. Seule au milieu des cadeaux sans âmes offerts par des parents trop affectés pour se rendre compte que leur fille manquait de compagnie, elle se morfondait dans les oreillers de son lit et rêvait d’une autre vie. C’est ainsi, après des mois d’intense réflexion qu’elle prit sa décision.
Convaincre ses parents ne fut pas aisé mais ce ne fut pas le pire écueil du parcours. Il fallut ensuite trouver le produit au marché noir et un médecin peu scrupuleux pour mettre en place le protocole malgré son état de santé. Heureusement pour Nyah, l’amour de leur fille unique et l’argent de la famille furent de bons moteurs pour mener le projet à terme.

Nyah est dans le coma depuis cinq mois. Depuis le jour de ma naissance. Elle était trop faible pour voir son rêve prendre forme et son regard n’a jamais croisé le mien. Aujourd’hui, je vis dans la terreur de la voir succombé à la maladie.
Je ne veux pas mourir. La vie est un cadeau que je veux chérir aussi longtemps que possible. Si Nyah ne guérit pas, je disparaîtrais avec son dernier souffle. Je ne serai même pas prévenue quand le moment se présentera. Elle a déjà fait un pas vers la Mort et je souffre à chaque seconde de son état végétatif. J’ai apprivoisé cette douleur au creux de ma poitrine : elle est mon pilier. Le seul moment où elle m’épargne, c’est lorsque je m’abandonne à la musique.
J’espère, à chaque seconde qui passe. J’espère que Nyah vivra pour que vive le cadeau qu’elle m’a fait.

  J’ai si peur de le perdre.